Kinshasa, le 27 mars 2024
Tout récemment, un confrère lançait une alerte affirmant que la souveraineté de la RDC était hypothéquée car le Fichier de la population, cette base des données renfermant les informations de tous les Congolais, serait entre les mains des étrangers. Plus les informations émergent, plus il y a lieu de s’inquiéter.
Le contrat signé entre l’Office National d’Identification de la Population (ONIP) et Afritech/IDEMIA fait craindre le trafic sur la nationalité congolaise principalement du fait de la personne qui est à la tête de ce partenaire : Samba Bathily.
Ce nom a récemment défrayé la chronique avec la requête de l’Inspection Générale des Finances à la DGM de lui interdire toute sortie du territoire national congolais suite à de sérieux soupçons de détournement d’une somme de 13 millions de dollars américains destinés à l’éclairage public dans la ville de Kinshasa. Et voilà que le même monsieur resurgit avec un contrat de plus d’un milliard de dollars pour l’identification de la population et l’octroi de la carte nationale d’identité. Le DG intérimaire de l’ONIP, Stanislas Kenza Lukengu, qui a octroyé ce marché à Afritech/IDEMIA s’était-il bien informé sur ce partenaire. Pire, pour un marché aussi important, l’ONIP avait privilégié une passation de gré à gré sans appel d’offre. Du côté de la Direction Générale de Passation des Marchés publics, la procédure aurait choqué, selon certaines indiscrétions.
Pour l’instant, une mission de l’Inspection Générale des Finances est à l’ONIP, en train d’éplucher les différents documents pour comprendre le sens de différents comptes parallèles créés au sein de l’entreprise, des comptes qui ont surtout permis une succession de missions de service à l’étranger. Surtout, semble-t-il, que même des personnes étrangères à l’ONIP auraient bénéficié de ces missions. En interne, certains agents de l’ONIP parlent carrément du phénomène « ngulu ».
L’identification de la population et surtout l’octroi de la carte d’identité va conférer et confirmer la nationalité congolaise à tous ses détenteurs. Au-delà de son rapport indélicat avec l’argent du Trésor Public, M. Samba Bathily, sujet malien dont l’entreprise va mener ces opérations, est aussi patron de SOLEKTRA Rwanda, une entreprise basée à Kigali. Quand on connaît les rapports actuels entre la RDC et le Rwanda ; quand on connaît la volonté de certains de nos voisins à l’Est de la RDC d’acquérir la nationalité congolaise pour des raisons expansionnistes et de pillage, on peut de demander s’il est bienvenu de confier le fichier de la population congolaise et la carte d’identité à un sujet dont le cœur se trouve à Kigali.
Carte d’Identité Nationale : les personnes « prioritaires ».
Y aurait-il deux catégories de congolais ? Alors que tous les Congolais attendent depuis des décennies la Carte d’Identité Nationale, force est de constater aujourd’hui que tous les Congolais ne sont pas logés à la même enseigne pour recevoir la carte d’identité. Tout comme au mois de février où l’ONIP avait choisi d’octroyer la carte uniquement à ceux qu’ils appellent les personnalités et à certains de leurs amis, l’expérience va une fois de plus se répéter comme s’il y avait des Congolais plus congolais que d’autres.
Le VPM de l’Intérieur Peter Kazadi Kakonde, visitant le matériel d’identification stocké dans les entrepôts de l’ex-ONATRA, a indiqué que l’on allait bientôt reprendre avec l’identification avec les VIP au Centre Financier de Kinshasa et même à son ministère. Pourquoi ce privilège à tous ces gens qui, il n’y a pas longtemps, cherchaient des bains de foule pour avoir les suffrages du peuple. Une fois élus, ils reprennent leur distance avec la « populace » et décident de s’enfermer dans leur monde des privilèges. Pourtant, le petit peuple, comme ils disent, a certainement plus besoin de la Carte d’Identité Nationale.
L’opinion se rappelle encore de la phrase choc du DG intérimaire de l’ONIP Stanislas Kenza qui, lors du briefing de la presse avec le Ministre Muyaya en décembre dernier, affirmait que celui-ci avait pu bénéficier facilement de la Carte parce que lui au moins est connu. Qu’adviendra-t-il des citoyens congolais qui ne sont pas connus. On sait que, comme en décembre, toutes ces personnes dites prioritaires viendront qui avec sa famille, qui avec ses copains et ses copines.
Dans cette logique instaurée par l’ONIP et le Ministère de l’Intérieur, que devient le slogan « Le peuple d’abord » ? Le peuple doit-il toujours être le dernier servi alors que l’opération de la délivrance de la carte d’identité devrait être une opération des masses ?
En y regardant de près, on a nettement l’impression que jusque-là on assiste à des scénarios visant à justifier les millions de dollars décaissés pour des fins inavouables. On parle de la multiplication de missions de service à l’étranger, qui ne sont en réalité que du tourisme déguisé. Pire même des personnes étrangères à l’ONIP ont pu voyager, semble-t-il, aux frais de l’ONIP pour aller s’installer en Europe, véritable phénomène ngulu.
Tout ce désordre orchestré par le DG intérimaire a causé une grande colère de Mme le DGA de l’ONIP, qui dans une lettre incendiaire à Stanislas Kenza a dénoncé une gestion catastrophique. La mission de l’Inspection Générale des Finances, qui séjourne actuellement à l’ONIP pourrait apporter la lumière sur le chaos annoncé.
Les travailleurs de l’ONIP attendent de voir leur établissement redevenir une entreprise normale et véritablement au service du peuple pour réaliser la promesse du Chef de l’Etat de doter chaque Congolais d’une carte d’identité.
LPP